Hervé au château by Cécile Aubry

Auteur:Cécile Aubry [Aubry, Cécile]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Aventure, Jeunesse
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Elle nagea vers Hervé…

Hervé s’extirpa de son sac de couchage, enfila un slip et, évitant autant que possible de déranger encore ses camarades, il courut vers l’extérieur.

Il vit la chienne filer à pas de loup vers la passerelle ; ses pattes de devant devaient la faire souffrir car elle boitait. Lorsque Hervé la rejoignit, il remarqua d’abord le pyjama de Sophie. Puis, en cherchant bien, il l’aperçut, elle, reprenant son souffle de l’autre côté des douves, accrochée des deux mains à la berge, à peu près là où avait abouti Esmeralda quelques heures plus tôt, au pied du saule.

« Tu es folle ? » lança-t-il.

Elle lui fit signe de se taire et resta dans l’eau. Pour la rejoindre, il fallait plonger ou faire le tour, traverser la cour de la ferme, sortir à la poterne, passer le pont et revenir en longeant la berge jusqu’au saule. Tout ça pieds nus, en slip et au clair de lune ? Non. Quant à se jeter dans cette purée noire… Passe encore pour les bains de minuit en Bretagne par beau temps en pleine chaleur du mois d’août, mais se baigner dans l’eau plus ou moins croupie des douves, quelle partie de plaisir ! Hervé frissonna. Quant à la chienne, elle tremblait. Elle se mit à gémir et à piétiner au bord de la passerelle, hésitant à sauter. Tout à coup elle renonça et, se décidant, elle fila dans la cour de la ferme : Sophie venait de plonger de nouveau ; elle resta sous l’eau un long moment.

« Elle est vraiment toquée ! pensa Hervé. Que veut-elle me prouver ? Quelle nage bien ? Je le sais depuis longtemps. »

Enfin, la tête de Sophie réapparut. Elle nagea vers Hervé et vint se tenir à la barque plate d’Aymeric amarrée sous la passerelle. Son visage que la lune éclairait paraissait très pâle. Elle aspira l’air, la bouche grande ouverte. De l’autre côté, Esmeralda arrivait, galopant vers le saule. Elle aboya et gémit lorsqu’elle s’aperçut que Sophie n’y était plus. Hervé voyait sa masse noire aller et venir, hésiter. Mais la chienne ne sauta pas à l’eau.

« Tu ne pourrais pas la faire taire ? chuchota Sophie. Il ne faut pas quelle attire l’attention des autres.

— Comment veux-tu que je la fasse taire », répliqua Hervé sur le même ton.

Il était furieux.

« Je n’en peux plus, murmura Sophie. Je n’arrive pas à rester assez longtemps sous l’eau. C’est dégoûtant, au fond, des paquets d’herbes et de vase…

— Sors de là, ordonna Hervé. Grimpe dans la barque et tends-moi les mains, je vais essayer de te hisser jusqu’ici. Tu dois crever de froid, en plus. Mais qu’est-ce qui t’a pris, espèce de folle ? »

Il s’était installé à plat ventre sur la passerelle, cherchant à atteindre les mains de Sophie. Il n’y parvenait pas.

« Allez, embarque dans le bateau ! »

Elle secouait la tête, l’air désespéré, claquant des dents :

« Non, je veux savoir.

— Savoir quoi ? »

Sophie ne répondit pas, elle aspira une grande bouffée d’air et plongea sous l’eau de nouveau.

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